L'ART DU NU ACADEMIQUE AU XIXème SIÈCLE
De
tout temps l'homme a aimé contempler un joli corps de femme, avec ou sans
artifices.
Dès la
Renaissance, l'anatomie fait partie intégrante de l'éducation des artistes et est
enseignée dans les académies, principalement à partir du dessin d'après l'antique et de
la dissection des cadavres. Des études préalables à la représentation analysent
en détail toutes les parties du corps humain.
L'étude du corps se fait donc
d'après nature ou par la
copie des œuvres d'art antique que l'artiste débutant, à défaut de moulages, trouve dans des recueils de
dessins ou de gravures spécialement prévus à cet effet, et qui font office de
manuels de morphologie. Dès sa création, l'École des Beaux-Arts fait référence à
ces canons classiques qui
demeurent la règle de son enseignement académique. Le dessin d'après modèle vivant et l'étude de l'art
gréco-romain constitueront d'ailleurs
les disciplines reines de son apprentissage au XIXème siècle. Les nus néoclassiques
vont prendre un caractère moral
dans des compositions dramatiques, anatomiquement parfaites, qui exaltent le
courage, le patriotisme, le sentiment héroïque. Les attitudes des personnages, dans
des mises en scène théâtrale, sont étudiées de manière à ne rien montrer qui puisse
offencer la pudeur, beaucoup de peintres
utiliseront d'ailleurs les ressources du drapé pour habiller les parties sensibles
de leurs figures et les rendre ainsi
plus
présentables.
L'arrivée de l'Olympia de Manet
marque un tournant dans l'histoire du nu. Dans cette peinture, la nudité
est représentée avec une certaine banalité qui ne cherche pas
l'élégance, mais la vérité à la manière de certaines représentations réalistes
de Courbet.
SAPHO ou SAPPHO
Deux
types de caractère féminin, en apparence contradictoires, sont alors en vogue
au XIXème siècle
:
En lien, deux canons de beauté se partagent ce siècle : Le stéréotype dominant, c'est celui de la féminité ronde et potelée, aux bras dodus, à la chevelure opulente et à la chair d'albâtre, à l'image par exemple des Vénus de Cabanel et Bouguereau. Le second, celui de la féminité maladive, de la troublante malade des nerfs, femme fragile et romantique, qui pourrait s'apparenter à Camille Claudel, et qui est menacée par l'hystérie décrite par Charcot. C'est aussi la belle malade du corps, la tuberculeuse pâle, comme Marguerite Gautier, la Dame aux camélias. Zola dans sa "Nana" ne manque pas d'exalter cette relation entre la féminité et la maladie réelle ou supposée.
Cela ne se limite pas à la littérature : entre 1830-1880 dans la peinture, en pleine période du romantisme, des préraphaélites anglais, on fait aussi l'éloge de la pâleur, des joues creuses, des cernes sous les yeux. C'est surtout cette image de la femme, pleine d'une froide sensualité, de langueur, avec un teint clair et une abondante chevelure, que retient le mouvement préraphaélite. Elisabeth Siddal qui a été la première femme de Dante Gabriel Rossetti en est le reflet dramatique. En 1862 elle se suicida au laudanum, un dérivé de l'opium. La belle et troublante Jane Burden qui fut sa seconde femme, et qui, comme Elisabeth lui servit de modèle, posa pour la très symbolique et emblématique Vénus Verticordia. Certains artistes, certains peintres, mais surtout les poètes développèrent l'idée que la maladie pouvait permettre de se distinguer du commun des mortels ; qu'elle donne au visage une «étrange splendeur», qu'elle singularise la personnalité et l'oeuvre. La médecine n'est pas en reste et vient renforcer cette tendance singulière. Les textes médicaux sur le sujet considèrent souvent la femme comme une créature enchanteresse et fragile, à qui la nature a donné le pouvoir d'enfanter, et selon le commentaire de Michelet sur ses menstruations « La femme subit même l'éternelle blessure d'amour ».
Cependant, en parallèle, on découvre le
bienfait des bains, le
besoin d'aérer son corps, mais raisonnablement, les premières excursions à la plage et la pratique du sport
se répandent... mais il faut bien entendu toujours se protéger
contre les mauvais airs et les rayons du soleil. Fini,
aussi, l'excès de fard qui caractérisait l'Ancien Régime. Les livres de beauté
critiquent d'ailleurs leur usage pour des raisons autant hygiéniques que morales : la femme
fardée n'est-elle pas une femme de mauvaise vie ?
Seules
finalement, et peut-être à cause du code strict de la morale, peinture et sculpture se
permettent de représenter la nudité.
Mais
essentiellement féminine. Alors l'artiste déshabille son modèle comme jamais et
ce ne sera qu'à la fin du siècle, sous
l'influence des modèles américains, lorsque l'homme va éprouver un attrait pour
la culture physique, que l'on retrouvera par la mode de l'antique un certain
goût pour la nudité masculine.
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